Chère Maman

Chère maman, au foyer,

 

J’avais envie de t’écrire cette lettre car je vis actuellement TA situation. La situation de nombreuses mamans qui nous entourent d’ailleurs.

Je pense à toi car je sais que ton quotidien est souvent jalousé ou souvent dénigré. Ce qui est certain c’est qu’il est peu valorisé et quasi jamais soutenu que ce soit par des proches ou des moins proches. Le moins qu’on puisse dire c’est qu’il est INCOMPRIS et même idéalisé.

IMG_1685Tu fournis un travail non rémunéré qui ne connait ni temps de midi ni pause café. Les trajets en voiture où on chante a tue tête te paraissent LOINNNN. Pas de récups au compteur ni de surplus d’heures pour gagner des congés. Toi t’as pas d’heures supplémentaires, toi tu te lèves et tu ne sais jamais à quelle heure tu te coucheras, tu continueras la nuit et chaque jour deviendra un lundi matin. (PUTAIN UN LUNDI MATIN).

Qu’importe les weekends, ils seront identiques aux jours de la semaine.

Je sais comment les autres te perçoivent, maison témoin, repas parfaits, tenues irréprochables, tête de poupée… Ils s’imaginent que tu manges à heures fixes, que tu te laves à heures fixes. Un monde bisounours de télé américaine. Même dans 7 à la maison c’est un peu parfois le bronx.

Ce que les autres ne s’imaginent pas c’est que la couche qui déborde et les habits à changer ne seront pas mis dans un petit sac, c’est toi qui t’en occupes. IMG_1689Je sais que tu vas te changer plusieurs fois dans la journée à cause de régurgitations improvisées, c’est vrai tu es présente pour faire tes machines, mais tu auras des bavoirs, des draps, des nappes, des vêtements en plus grande quantité…

Tu seras seule à gérer les coliques de bébé, les poussées dentaires, le stress des premiers érythèmes, des premiers maux et tu feras 4567908765 pas, tu tourneras en rond, tu finiras par craquer, en pleurs et impuissante. Car des larmes, la mère au foyer elle en verse aussi!

Je sais que tu tentes de jongler entre des repas parfaits (image de la société), que tu tentes déjà de manger tout court ou que tu ingurgites un pseudo repas en 37 secondes et demie. Que tu avaleras aussi les cochonneries sous la main pour gagner en énergie. Oh oui c’est sûr il y en a des chanceuses ou les bébés font plusieurs siestes par jour, des bébés qui s’occuperont vite seul ou même des bébés bien calmes… Je ne fais pas partie de celles-là, des enfants qui se lèvent très tôt, avec lesquels on a du batailler pour instaurer un coucher moins tardif, des réveils nocturnes a gogo depuis plus de 3 ans maintenant.

J’ai opté, moi aussi, pour la motricité libre, bébé au sol qui expérimente,  avec le pack attention mutlifocale. Tes sens sont toujours en alerte (pas 1 seconde de repos je te dis), tu oublies d’ailleurs de répondre aux copines. Tu reportes presque tout à plus tard.

Faire pipi peinarde? la blague du siècle, tu as un mioche sur toi, près de toi… Tu as tenté le parc, le transat mais tu sais comme moi que si bébé a besoin de toi, tes instincts primaires font que tu patientes et que tout le temps que tu as sera pour lui/elle. Qu’un bébé qui a faim n’attend pas, qu’un bébé qui a soif n’attend pas, qu’un bébé qui a des coliques ne sera apaisé que par les bras (celles qui tentent de me lâcher ne pas l’habituer aux bras risqueraient de se prendre dans la tronche une poussette et une quantité de jouets inutiles avec! #intox).

Je connais ces moments de repos que tu as… Quand tu nourris ton enfant. Assise. Bébé contre toi (ici allaitement à la demande et ce sans mentionner les pics de croissance qui te clouent à ton lit? Ton canapé? Ta chaise d’allaitement?…)

Je sais que tu ne connais plus le mot baignoire… Que tu en gardes un vague souvenir sauf si tu t’amuses à prendre un bain avec ton poupon (même si tu retenteras l’expérience quand papa sera là car sans déconner c’est galère de sortir et de s’occuper des deux à la fois… Tu grelottes toi aussi n’est-ce pas?). Je sais ce que c’est de s’occuper d’un enfant seule, ou de deux enfants seules, enchainer, à la queue leu leu… On en perd de la sueur, on en perd!

Toi aussi tu fais les courses pour la famille… Mais avec un mioche qui te réserve la surprise du siècle: soit l’enfant dort et tes courses sont géniales, soit ton enfant a soif/faim (oui tu avais calculé pour ne pas tomber dans ce cas précis, mais les besoins primaires ne se calculent pas), ou encore surprise, une couche qui déborde et tu observes la moutarde tapisser le cosy avec horreur, impuissante…. Je sais ce que c’est de porter bébé et les courses (je suis toujours surprise de ne pas être plus musclée d’ailleurs), de remettre au lendemain ou de déléguer au conjoint les derniers oublis de bouffe… (Chéri j’ai oublie ça tu peux en prendre ne passant stp?)

Je sais aussi que le manque de vie sociale va te bouffer, te consumer, ce besoin de parler à quelqu’un, un sujet normal, de toute façon on n’est plus dans le coup… En retard de 4 guerres concernant l’actualité, t’as l’impression d’être à la ramasse totale toi aussi?!

Je sais aussi que tu galères a nettoyer minimum 3 fois par jour la table du repas, le sol qui est avec vu les multiples aliments qui s’y retrouvent (quand bébé grandit). Que ton aspirateur devient TON MEILLEUR AMI et que tu passeras beaucoup de temps dans la journée à écouter son son mélodieux… Tu n’échapperas pas aux régurgitations qui tacheront le canapé, les draps, et tout ce qui est sous tes pieds et autour de toi.

Moi aussi j’ai rangé 3500 fois de suite les jouets. Moi aussi pendant que je rangeais un coté, j’ai cru naïvement que l’autre côté resterait rangé (erreur fatale de maman débutante, t’en fais pas avec le temps tu lâches prise, de toute façon t’as pas le choix sinon le navire coule). Alors tu repousses le rangement en soirée sinon tu t étouffes dans « non pas ça« , « range ça«  »nooooooonnnn« . (non tes yeux embués n’y changeront rien).

Moi aussi j’ai regardé ma montre en me disant « aaaah c’est la pause café » pendant que je tentais de décoller mes fesses du (fu*****) canapé ici c’est pause tétée…

C’est pas facile de ne plus être indépendante financièrement parlant. D’être aux yeux de mère société un larbin, tu sais celle qui fout rien, peinarde chez elle à élever ses gamins. Ben celle là elle fait le travail de la nounou (gratis faut pas déconner c’est pas difficile hein, comment ça faut faire des études??), elle quitte aussi son domicile pour conduire les plus grands enfants à l’école. Qu’elle case ses coups de téléphones, qu’elle voit ses copines (avec le/les mioches), qu’elle manque souvent de temps (surtout pour elle). Je n’ose même pas aborder l’estime de soi…

Le conjoint? 

Ben le conjoint travaille!!! Un vrai travail, avec des contraintes, des horaires et tout et tout. Quand il rentre c’est normal qu’il puisse mettre les pieds en éventail, qu’il s’installe pour manger ou qu’il puisse se prélasser sous la douche CAR LUI EST FATIGUE. ( Je suis moi-même devenue jalouse de ses moments privilégies).
(lui c’est légitime, tu comprends?). Bon, ici monsieur est indépendant et fait des horaires de dingue! Par contre dans ce que je vois autour de moi, les gens ne travaillent pas 10h sans pause. SI? Ah ben mère au foyer alors? Je rêve d’un temps de midi, ou je peux papoter quelques minutes avec mes collègues en avalant mon repas dans un bento!

Je sais que le plus difficile est le manque de considération, le manque de soutien, et ce sentiment d’être larguée. Oui, évidemment  que le sourire de la progéniture ravigote et heureusement.

Quand tu es maman à plein temps c’est un sacré luxe d’élever son enfant, de pouvoir ne rien louper de ses premières fois, de pouvoir tout connaitre, mais en contre partie c’est un peu un sacrifice (attention, je te vois venir toi!!!). (il y a des mères qui n’ont pas le choix pour de multiples raisons, il y a des mères qui ne veulent carrément pas être mère au foyer, et celles qui prennent cette chance comme une chance, la perception de chacune doit être respectée).

En ce qui me concerne, je suis reconnaissante d’être dans ma position, je n’ai jamais osé l’espérer et pourtant j’ai cette chance incroyable. J’ai tout de même hâte de reprendre le travail pour souffler. Pour légitimer mon droit de m’éterniser sous la douche, de justifier pourquoi cette pièce là de la maison n’est pas terminée, de couper la poire en deux et donner des tâches au conjoint, on partage qui va chercher quand le gosse! Ou encore pour enfin pouvoir dire « je suis fatiguée ». Non mère au foyer, c’est épuisant. La charge mentale qui pèse sur les épaules c’est wouahhhh… Mais on n’a pas le droit de se plaindre car… On s’occupe de nos enfants et que d’autres n’ont pas cette chance. Pour certaines c’est sans doute plus facile, toute dépend de l’enfant, du caractère du parent, du choix de maternité aussi, maternante ou non.

Si je dormais la nuit, j’aurai un tout autre discours! Si mes enfants avaient fait des siestes, également. Par exemple.

Alors oui c’est une chance MAIS NON ce n’est pas plus facile. Nous vivons dans une société ou tout doit être parfait. La course à l’élite comme je dis toujours.

Tu sais que je me casse la tête pour préparer des activités aux filles (aaaah c’est certain que les mettre H16/jour devant la télévision m’aiderait pas mal, mais le but justement d’être mère au foyer c’est pour s’occuper de ses enfants et non pas courir après la dernière vaisselle à faire).

Dans la journée je m’occupe des tâches lorsqu’elles jouent ensemble, je m’active comme pas possible. Mais si l’une ou l’autre me demande mon attention, je demande de patienter le temps de finir ce que j’ai commencé ou j’arrête tout. Je m’investis pour leur offrir un temps de qualité. (sans mentionner les bêtises au passage hein).

Je tente de garder mon calme après 6h de cris, de pleurs et/ou de chamailleries. Je tente de continuer sur la voie de la bienveillance qui m’est chère. Mais tu sais quoi? Parfois j’y arrive pas! J’ y arrive pas car j’ai pas le temps de prendre du recul, pas le temps de souffler qu’une autre bêtise à l’horizon se pointe, que le temps du repas est re arrivé, alors je culpabilise le soir, je m’excuse à chaque fois, on communique et rien  n’est tabou, mais c’est difficile!
C’est difficile car je sais que si j’avais de quoi souffler de temps en temps ça n’arriverait pas, ou beaucoup moins. Je suis mal à l’aise face à ma manne de linges qui déborde littéralement, et au sol moucheté de choses non identifiables à souhait. Au moins quand je partais tôt le matin, je savais qu’en rentrant ma maison serait à l’identique vu que bébé était chez nounou.

Mère au foyer ça ne gravit pas des échelons comme dans pokémon. Y a pas de gloire, pas de promotion. Y a pas vraiment de merci, c’est normal quand on est mère de s’occuper de ses enfants. Du coup, tout est banalisé, normalisé.

Si j’avais su à l’avance la charge de travail… Je me serai prévenue, et je me serai préparée bien plus tôt à lâcher prise. A différencier le grave du pas grave. Non un coup de marqueur sur un mur n’est pas si grave, non la farine sur la moquette c’est pas si grave, non se salir c’est pas grave… Tout se lave! Mais n’importe quelle maman, avec honnêteté, n’est pas capable de lâcher prise des le départ. Entre la pression de l’enfant bien éduqué, l’enfant intelligent, propre sur lui et qui récite l’alphabet à 1 an… Ben oui t’es à la maison pour t’occuper du gosse t’as que çà à faire.. LOL!IMG_1761

 


chère toi, chère moi. Si c’est ton choix, ne laisse jamais personne te dire que tu en fais moins. 
Seule une maman dans une situation similaire peut comprendre. 
Entre femmes, ne devrions nous pas nous aider? Nous glorifier? Sinon qui le fera?


 

Au lieu de cela c’est « tu as repris le travail? »
Ca doit être drôle d’être a la maison (ils ont cru que je vivais dans un cirque?)

Souvent on me demande ce que je fais de mes journées (ah ben je dors, je mange et je lis des bouquins devant la téloche!). Mère au foyer n’est pas un métier (pourtant… D’autres sont rémunérées pour ce type de travail). CE que je fais? je prépare le repas avec le gosse en porte bébé. Je passe l’aspirateur avec un bébé dans les bras. je jongle tel shiva pour la rentabilité des tâches quotidiennes. Je materne à n’en plus finir, matin, midi soir et nuit. Je m’occupe de l’enfant et je m’oublie un peu beaucoup. J’apprends des tas de comptines et change de casquette tout au long de la journée. Je dégaine un bras tel inspecteur gadget lorsque miss tente de faire tomber mon vase ming. Je prie le sol de ne pas grincer lorsque je viens de déposer bébé et ce tout en grimaçant comme si j’étais sur le point d’être assassinée. Je joue à coucou beuh lorsque je tente de prendre une douche et que bébé n’était pas d’accord. Je sursaute au moindre babillement. J’ai parfois envie de m’effondrer dans mon tas de linge qui jonche le sol mais je me reprends, une mère au foyer ça doit avancer (demande à mon mec ce qu’il pense de la buanderie). Mais c’est glorifiant de voir ton enfant sourire, de voir qu’il t’imite dans tes moindres faits et gestes, tu meurs et chavires au moindre progrès et ça ça mérite toutes les reconnaissances que dame société ne t’octroie pas. Parce que cette dame société, la connasse, c’est elle qui nous monte les unes contre les autres. Si on est pas toutes égales à ce niveau c’est que l’état l’a décidé. (mais ça je te le le laisse pour la conclusion de demain ma chère petite).

Mon quotidien est vivifiant, joyeux, douloureux, fatiguant, essentiel, terrifiant, fantastique, plein de surprises, beau,… Et j’en passe mais surtout non stop! C’est simple, je t’écris ce soir et je suis déjà montée 4 fois… Interrompue 4 fois (et ce n’est qu’un début!).

Je ne touche pas de salaire, je n’ai pas d’horaire défini, pas de treizième mois, ou de prime, je n’ai pas de salle de pause ni de cantine/réfectoire. Vu que je ne suis pas une personne « active » je ne peux accéder à la reconnaissance sociale.

Mais je dois admettre que je suis heureuse de pouvoir être présente, que pour moi ça vaut tout l’or du monde. Que ça me remplit complètement et que je me sens privilégiée. Je n’échangerais pas ma place c’est certain.

Je vais m’arrêter ici pour ce soir et t’écrire mon autre lettre à mon moi qui travaille dès demain, car je tombe de fatigue, et qu’en plus je me rends compte qu’il est déjà très long! TROP LONG? si j’intercale la deuxième lettre tu vas me détester. Puis au final on garde un peu de suspens :):)

 

Chère maman au foyer, il en faut des mamans qui sacrifient aussi le boulot et la vie sociale. Il en faut des mamans pour faire un boulot qui ne connait aucune pause et qui promet la promesse de faire évoluer les mentalités de par nos petits chérubins.
Je t’embrasse chère maman. Je t’embrasse bien fort même et te souhaite une bonne  nuit.

 

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ps: Je dois cependant admettre que je suis sensible à ce qui touche MA maternité. Que je remarque lorsque je me prends des critiques que ça vient toujours d’une personne qui travaille de façon traditionnelle. Et que jamais une mère au foyer n’attaque l’autre partie. Comme si le fait de travailler ajoutait un super pouvoir, comme si ça plaçait les gens au dessus des autres… Rester à la maison ne traduit pas un manque d’ambition.

Merci, vos confidences, vos histoires, vos joies, vos doutes, vos ressentis. Merci pour la bienveillance des deux côtés et de votre sincérité.

Bravo à toutes.

Nous sommes toutes des Mères veilleuses
quoi qu’en pense la voisine, la copine, l’inconnue…

 

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